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LE THÉATRE D’HIER.

moderne et observateur est de Ryons, avec quelque chose de plus aigu : de même race, de même esprit, et parisien par excellence…

« Je vous reconnais parfaitement, a écrit de lui l’auteur. Vous avez de l’esprit beaucoup, trop quelquefois ; mais vous êtes observateur, vous avez de la finesse, de l’induction et de la déduction. Seulement, vous avez été mal élevé… Vous êtes allé trop jeune chez Ellénore, qui vous a pris votre montre. »


Est-ce à dire qu’il en ait gardé rancune à la vie et à la fille, et que son idéal « ne puisse s’incarner en aucune femme, fille de la femme ? » C’est le pousser au noir par un effort d’analyse, et l’attirer au piège d’une doctrine, qui n’était pas encore de mode en ce temps-là. A-t-il même un idéal ? Je le soupçonne d’être à la fois plus pratique et moins ambitieux. Il a conscience de sa valeur (oh ! pleinement} ; il estime assez haut le cœur qu’il donnerait, s’il lui arrivait de le donner, et qu’il se contente d’amuser et de distraire pour ne le pas mettre en hasard. Mais ni distractions ni amusements n’altèrent sa perspicacité. Il a percé à jour la femme contemporaine ; il l’a consolée, mais il l’a jugée. Égoïste, celui-là ? Si peu que rien. Pessimiste ? À son âge, avec sa santé, et parmi l’existence qu’il mène, vous n’y songez pas ! Dilettante ? Avec délices, et aussi sans sécheresse de cœur. Il épousera mademoiselle Hackendorf, parce qu’elle est jolie et modeste, et qu’il a du goût ; à moins qu’au dernier moment il ne se ravise, parce qu’il a de l’esprit, et qu’il en sait long sur la modestie du siècle. Il me semble que voilà le trait le plus original et pénétrant du caractère, et que l’auteur l’a indiqué d’une main légère et sûre, et qu’on ne saurait trop admirer de quel art réfléchi il a su garder la mesure entre le scepticisme fanfaron, qui n’est que fausse élégance, et l’outrecuidance vaine, qui est le contraire de l’esprit et du goût. C’est un prêtre laïque, a dit plus tard M. Dumas ; mais pratiquant, et dont le