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EUGÈNE LABICHE.

et l’atelier de la modiste, et le salon de la baronne, et le bain de pieds : exode burlesque, pendant lequel le rire semble sourdre des dessous du théâtre. Enfin sauvés, mon Dieu ! — Quoi donc ? — Elle a le chapeau — Peuh ! — Mais n’est-ce pas le sujet ? — Peut-être… Voyez plutôt qu’il n’y a point de sujet, point de chapeau, rien de rien, sauf l’inépuisable fantaisie qui entraine la mascarade, et une certaine logique ahurie qui en distribue les étapes, et la soudaineté des hasards et l’épileptique joyeuseté des quiproquos, le fin du fin dans ce genre, dont Labiche a marqué l’apogée, et qui se résume en un mot, celui du factionnaire qui veille à la place Baudoyer : « Circulez ! »


III

LE COMIQUE.


Circulez, pitres suaves, endiablés fantoches, avec cette sérénité de bêtise qui s’étale, cette intrépide cocasserie, qui brûle les planches, et qui vous donne les plus étourdissantes apparences de vérité.

Car il demeure entendu que le grand prestige de Labiche, qu’il s’agisse du dessin des pièces ou des personnages, est encore la gaîté. Dieu nous garde de les prendre trop au sérieux, ces types, ces bons types, qui ont des dehors si bien allants qu’ils ont l’air d’avoir aussi des dessous. Si jamais fantaisiste sans prétention réussit à marquer même ses plus invraisemblables caricatures d’une certaine empreinte de vie, c’est notre Labiche ; et j’ajoute que c’est le meilleur Labiche, le plus étonnant allumeur de silhouettes. Combien de ses rôles — dont l’âme se réduit à un tic ou un mot rencontré — sont enlevés d’un relief incroyable ! Il y a en eux comme une excellence d’illusion théâtrale, à