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pas, mais que l’on n’aura jamais le droit de m’imputer. Dût cette lettre éclairer une importante question littéraire et redresser une vérité obscurcie, il faut toujours, pour la publier, la permission de celui qui l’a écrite. J’attendrai cette permission de M. Génin, et j’espère qu’il ne m’en voudra pas quand je me contenterai de dire que ses lettres à lui sont agréables et qu’elles sentent son bon littérateur. Il ne faisait pas en ce temps-là les vers blancs de la Chanson de Roncevaux. Que de malices, que de traits fins et mordants, contre les idoles qu’il soutient ou qui le soutiennent aujourd’hui ! que de protestations d’éternelle loyauté, de franchise et de justice envers et contre tous ! Nous étions jeunes alors ; mais aujourd’hui que je ne le suis plus, je lui accorde de grand cœur le droit qu’il n’avait pas, de publier toutes mes lettres. Il n’a pas attendu cette permission ; mais ce sont peccadilles dont chacun augmente ou diminue la gravité, en raison de ses anciennes ou de ses nouvelles habitudes.

Un seul mot encore sur le post-scriptum de M. Génin. Il s’y défend d’avoir fait une troisième édition d’une ancienne critique à laquelle il n’aurait emprunté que l’indication de trois de mes bévues. Je vais compter ces trois bévues : ambo, baucent, chagrin, concions, expanditus, grains, samit et seta. C’est, on en conviendra, compter à la bonne mesure. Il se repent de n’avoir pas fait un quatrième emprunt : l’origine du mot charbon de terre, « ainsi nommé parce que l’Angleterre le reçoit du continent. » M. Génin sait pourtant bien que je n’avais rien dit de pareil. Le texte du Don Juan de lord Byron portait sea-coal ; « so called, dit Samuel Johnson, because brought to London by sea. » Et ma traduction (car j’ai traduit Don Juan, ce que le public me fait l’injure d’ignorer) portait : charbon de mer ; puis on note : « Ainsi nommé parce qu’il vient du continent. » À tout considérer, M. Génin aurait donc bien fait de ne pas employer ce charbon de terre, et son indignation me rappelle l’extase de cet Allemand qui fondait en larmes en lisant le fameux passage de la Nouvelle Héloïse : « La nuit est profonde, la roche élevée, les flots rapides, et j’en suis au désespoir ! »

Si nos lecteurs ne sont pas fatigués de la Chanson de Roland, je donnerai enfin, dans la prochaine livraison, mes observations sur le texte, sans être arrêté par la nouvelle objection préjudicielle de M. Génin. « Je suis, dit-il, embarrassé de deviner sur