Page:Paris, Paulin - Romans de la Table Ronde, tome 1.djvu/224

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
218
LE SAINT-GRAAL.

ainsi qu’on va l’exposer ; car ici l’on n’avance rien qu’on n’en donne l’explication : sans cela on ne verrait dans le Graal qu’un enlacement de paroles, et l’on n’en garderait qu’une idée confuse ; mais dans ce livre, qui est l’histoire de toutes les histoires, il ne faut laisser aucun doute sur rien de ce qu’on rapporte.

Avant le commencement de toutes choses, les quatre éléments confondus n’étaient qu’une masse inerte et sans forme arrêtée. Le fondateur du monde[1] disposa d’abord le ciel, dont il fit le séjour du feu, la voûte et la dernière limite de l’univers. Entre le feu, qui de sa nature est extrêmement léger, et la terre, qui est extrêmement lourde, il plaça l’air, puis creusa des lits plus ou moins vastes pour recueillir les eaux. Mais, avant cette séparation, chacun des éléments, en luttant et en se pénétrant, avait perdu quelque chose de ses propriétés naturelles ; c’était une sorte de rouille, d’écume ou de scorie, qui tenait de tous les quatre, et formait comme une cinquième substance de tout ce que les autres avaient rejeté. Or l’harmonie établie par le divin Créateur aurait été trou-

  1. Li establissieres del monde. On voit que notre auteur croyait à l’éternité des quatre éléments, de ce que nous appelons la Matière.