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ARTUS ARMÉ PAR GENIEVRE.

n’eut plus que le heaume à prendre, elle se mit à genoux pour lui chausser les éperons. Merlin sourit en la montrant aux deux rois ; puis se tournant vers Artus : « Sire, sire, c’est d’aujourd’hui seulement que vous êtes chevalier nouvel. Vous pourrez à bon droit dire que vous devez votre chevalerie à fille de roi et de reine. Une seule chose y manque encore — Et quelle est cette chose ? » dit Artus ; « ma dame la fera, s’il n’y a pas honte à l’accomplir. » — « Certes, » dit Genièvre, « à rien de ce que je ferais pour vous ne peut se trouver honte ou laidure : je vous sais à trop courtois pour craindre de vous la moindre vilainie, et si vous me la demandiez, le reproche en serait plus sur vous que sur moi ; car je ne puis avoir honte que vous ne la partagiez. » — « On ne peut, » dit Merlin, « parler plus sagement : mais de ce que je demande ne peut venir aucune honte ni reproche. — Dites donc ce que vous voulez encore. — C’est, » fait Merlin, « le baiser, si la demoiselle ne le refuse pas. — Oh ! » dit Artus, « il ne s’en faudra pas de cela que je ne sois son chevalier. — Moi, » dit à son tour la demoiselle, « je ne veux pas non plus manquer pour cela d’être à vous, et vous à moi. De quoi me ferai-je prier ? je l’ai pour agréable aussi bien que vous[1]. »

  1. Je regrette que cette jolie phrase soit répétée