aux deux bras de façon à lui ôter tout moyen d’échapper. Le sauvage se réveilla, regarda autour de lui, comme pour chercher sa massue, mais ne put faire un mouvement. On fit approcher un des chevaux sur lequel on le mit en selle, et Grisandole montant en croupe prit la voie qui conduisait à Rome. Chemin faisant, il voulut le faire parler, mais l’homme sauvage jetant un rire de dédain : « Créature déformée de sa vraie nature, » dit-il, « amère comme suie, douce comme miel, la plus décevante, la plus subtile chose du monde, orgueilleuse comme sanglier et léopard, piquante comme taon, venimeuse comme serpent, je ne te répondrai que devant l’empereur. »
Bien que Grisandole ne comprît pas le sens de ces paroles, il en conclut que l’homme sauvage était doué de sens et de sagesse. Ils arrivèrent ainsi devant une abbaye, et trouvèrent à la porte une foule de gens qui attendaient l’heure de l’aumône. L’homme sauvage, tournant les yeux de leur côté, se prit à rire. « Au nom de Dieu, » dit Grisandole, « apprends-moi pourquoi tu as ri. » L’autre répond : « Image déformée, dénaturée, tais-toi ; ne demande rien : je ne parlerai que devant l’empereur. »
Le lendemain, arrêtés devant une chapelle où l’on allait chanter messe, ils descendent de