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MERLIN.

ait jamais jusqu’à présent approché de moi ! » À ces mots, les femmes se signaient : « Belle amie, ce que vous nous dites n’est pas, et n’a jamais pu arriver. Vous aimez mieux apparemment celui qui vous a connue, que vous ne faites vous-même. Vous ne voulez pas l’accuser ; il vous en arrivera malheur ; quand la justice le saura, il vous conviendra mourir. Faut-il que tant de belles maisons, tant de belles terres soient perdues ! »

La justice n’attendit même pas la délivrance de la jeune fille : avertie de ce qu’on publiait, des sergents vinrent la prendre. Elle fit sans hésiter l’aveu qui devait la faire condamner. Le prud’homme, qui ne la perdait pas de vue, pria les juges d’attendre au moins que l’enfant fut mis au monde. « Je ne vous dirai pas, » leur dit-il « ce que je pense de cette femme ; mais le fruit qu’elle a conçu n’est pas coupable. Ordonnez donc que la malheureuse mère soit enfermée dans une tour, et séparée de toutes les gens du dehors. Donnez-lui pour compagnes deux femmes qui l’aideront au moment de sa délivrance, et qui n’auront de communication avec personne, avant d’avoir rempli cet office. Pour la mère, vous lui accorderez le temps d’allaiter son enfant, jusqu’au jour où il pourra supporter une autre nourriture. Puis vous ferez d’elle tel juge-