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le chevalier qui pleure et qui rit.

n’ont rien à voir dans ce que je fais : je ne demande pas leur compagnie. — Cela ne peut passer ainsi. — Comment donc cela passera-t-il ? Entendez-vous m’obliger à dire ce qui ne vous touche en rien ? — Oui ; vous parlerez, ou vous vous défendrez. »

L’inconnu lace aussitôt son heaume, remplace l’écu blanc au noir quartier qu’il portait, par celui qui était suspendu à l’arbre, non sans gémir et sans verser de nouvelles larmes : il empoigne la plus forte des lances que le valet avait apportées et attend Sagremor. Celui-ci rompt son glaive sur l’écu noir goutté d’argent, mais dès la première atteinte il est jeté des arçons. En même temps l’inconnu saisit le frein, frappe rudement le cheval, et le fait galoper à vide du côté de la forêt.

Rien ne se peut comparer au dépit, à la confusion de Sagremor. Keu, charmé de sa mésaventure, dit en riant à messire Gauvain : « Ne pensez-vous pas que Sagremor aurait pu ne pas tant se presser ? » À son tour il broche des éperons, et raille encore en passant le pauvre Desréé : « Vous avez votre droit, Sagremor : êtes-vous content ? »

Mais il allait être payé de la même monnaie. Le chevalier du Pin, qu’il interrogea et défia de même, répondit en lui faisant mesurer la terre, et en chassant son cheval du côté de la forêt.