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gauvain et le chevalier alité.

reprendre par le poing, pour lui ôter la deuxième épée : « Je vois, dit-il, que vous voulez me livrer sans défense à ces gloutons. — Donnez, sire, il le faut. » Elle dit ces mots en souriant ; Gauvain ne résiste plus et abandonne encore son épée. La pucelle fait signe aux assaillants de vider la place, le prend par la main et le conduit dans la première salle : « Chevalier, dit-elle, vous êtes pris ; j’ai votre épée : voyez s’il vous plaira de payer rançon. — De quelle rançon s’agit-il ? — On vous l’a déjà demandé : plein heaume de votre sang. — Jamais ! la honte en serait trop grande. J’aime mieux garder prison. — Allons ! un prud’homme ne doit pas pourrir en chartre, et quand vous saurez ce que nous entendons faire de votre sang, vous ne le refuserez plus. Sachez que le chevalier que vous avez vu si malade doit voir ses plaies se fermer quand les deux meilleurs chevaliers du siècle voudront bien lui donner une écuelle pleine de leur sang pour en oindre l’un son bras, l’autre sa jambe droite. Ne serait-ce pas à vous grand honneur d’être un de ces deux chevaliers ? — Demoiselle, reprit Gauvain, je voudrais qu’il en fût ainsi ; mais je sais que Dieu ne m’a pas fait si grande grâce. Je tenterai pourtant l’épreuve, pour témoigner de mon grand désir d’adoucir les souffrances de votre chevalier. »