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le bon roi Ydier.

armes, en jurant d’avancer toujours au delà de toutes les autres bannières, et de ne pas reculer d’un pas. Elle était blanche à grandes raies (ou bandes) vermeilles, le champ de cordouan, les raies en écarlate d’Angleterre ; car en ce temps-là, les bannières n’étaient pas de cendal, mais de cuir ou de drap[1].

Jamais les compagnons de la Table-Ronde ne firent mieux en l’absence du roi Artus : aucune échelle ennemie ne put arrêter le preux Ydier : de toute la journée il ne délaça pas son heaume, et jusqu’à la fin il tint le serment de pousser en avant, tant qu’il y aurait des païens à frapper. « Dieu, criait-il, me fasse la grâce de tenir mon vœu, fût-ce au prix de ma vie ! plus belle mort ne saurait être désirée. » Les Saisnes finirent donc par lâcher pied et la chasse commença : en tête des poursuivants se trouva toujours le grand cheval d’Ydier. Par malheur, il passa sur le corps d’un Saxon qui avait gardé son épée droite ; la pointe en frappa le ventre du bon coursier, lequel prenant le mors aux dents, alla s’affaisser et mourir un peu plus avant. Le roi tomba engagé sous ses flancs,

  1. « Li chans de cordouan et les raies d’escarlate à un drap vermeil d’Angleterre. Ne tant comme l’en portoit l’en à cel tems, n’estoient-eles se de cuir vermeil non et de drap » (ms. 339, f° 63).