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FRANÇOIS VILLON.

d’une confession générale, si on peut appeler ainsi des aveux où il entre si peu de repentir ; puis ce trait éminemment romain disparaît dans l’art conventionnel et dans limitation de la poésie alexandrine. Le christianisme, qui approfondit l’analyse des âmes, aurait dû développer ce genre, mais il n’a pas, dans la période antique, produit de poésie adéquate à sa valeur morale, et c’est en prose qu’il a inspiré, dans les Confessions de saint Augustin, l’un des plus saisissants examens de conscience que l’humanité ait produits.

Ce n’est en général que lentement que la poésie personnelle arrive à se faire jour : le moyen âge l’a peu connue, au moins en France, car Dante a rempli de sa puissante personnalité toutes ses œuvres, même les plus objectives en apparence. Chez nous la poésie lyrique, organe naturel de l’expansion de l’âme du poète en dehors de lui, a presque exclusivement servi de véhicule à des sentiments de pure convention, dont on apprenait la combinaison et l’expression comme on apprenait les règles de la construction des strophes et de leur mise en musique. Çà et là cependant nous trouvons quelques notes qui annoncent de loin Villon. Colin Muset nous fait connaître ses goûts de gentil bien-être et quelques épisodes de son existence vagabonde. Rustebeuf étale sous nos yeux, — mais peut-être avec l’exagération professionnelle, — sa vie précaire de jongleur et les petites misères de son ménage. Plus tard, Eustache Deschamps, dans beaucoup de ses innombrables ballades, se met lui-même en scène pour nous confier ses ennuis domestiques, ses mésaventures de cour, ses impressions de voyage,