Aller au contenu

Page:Paris - Légendes du Moyen-Âge.djvu/136

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

c’est, on le voit, tout le second acte du drame ; Mathilde est devenue Élisabeth, en empruntant un reflet mystique à l’auréole de la sainte qui devait être la belle-fille du landgrave Hermann, et Henri d’Ofterdingen a été remplacé par Tannhäuser, auquel le poète a même laissé le prénom d’Henri. Wagner a ainsi, avec une remarquable habileté, « corsé » le thème principal de son œuvre. Du même coup, il a mis au premier plan le problème qu’il voulait traiter, l’opposition de l’amour idéal à l’amour charnel. Mais il en est résulté, dans le caractère du héros, quelque incohérence, et, dans la donnée même du drame, quelque incertitude. Au lieu d’aller droit à Rome, pour se purifier de son péché, en sortant du Venusberg, Tannhäuser s’y rend parce que sa criminelle aventure a été, par sa faute, révélée à tous, et pour en revenir digne de l’amour d’Élisabeth : dès lors, le miracle de la grâce octroyée par Dieu malgré le pape perd sa vraie signification, et le salut final du pécheur semble dû beaucoup plus aux prières et à la mort d’Élisabeth qu’à son propre repentir. Ce salut même, qui satisfait les spectateurs, est moins grandiose et moins émouvant que le dénouement terrible et mystérieux du vieux lied, la rentrée de Tannhäuser, désespéré, dans le paradis infernal qui se referme à jamais sur lui.


* * *