Page:Paris - Légendes du Moyen-Âge.djvu/158

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félicité parfaite qui ne se trouve pas sur la terre. C’est ainsi que les rêves des vieux âges, passant de lieux en lieux, et de générations en générations, se colorent des pensées changeantes des époques, des races et des patries qui se les transmettent. L’antique « Hespérie », la terre que le soleil visite au-delà des mers du couchant, est devenue le pays féerique, peuplé de femmes d’une incomparable et éternelle beauté, où règne la félicité sans mélange. Des mortels y sont allés, et l’on en a vu revenir vivants quelques-uns qui y sont retournés pour toujours. Ailleurs, c’est dans une de ces montagnes qui semblent former la barrière de l’empire nocturne du soleil, qu’on a placé le palais de l’éternelle jeunesse. Le christianisme est venu : l’Église voit dans ce faux paradis un véritable enfer, et refuse d’absoudre le téméraire qui assure y avoir pénétré ; mais le peuple croit que Dieu aurait pardonné à celui qu’a égaré le rêve indomptable du bonheur. Et le poète philosophe de nos jours ne trouve que vanité dans le rêve lui-même, tandis que pour le dramaturge la lutte entre l’enfer et le paradis devient la lutte entre deux formes de l’amour... C’est toujours, sous des masques différents, le même visage qui nous apparaît, le même sphinx qui nous fascine. Nous voudrions accorder les joies éphémères de