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Page:Paris - Légendes du Moyen-Âge.djvu/199

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qu’elle ne le semble au premier abord. Tous les poètes et romanciers, en France, en Allemagne, en Angleterre, qui ont essayé de la développer, ont échoué et devaient échouer. Une épopée du Juif Errant ne sera jamais qu’une série de tableaux historiques, auxquels manquera un lien réel. L’élément vraiment poétique du sujet, l’impossibilité pour un homme qui serait immortel de goûter les joies de la vie mortelle, est gâté ici par le fait même que l’immortalité, au lieu d’être un don imprudemment souhaité, est dès l’abord, pour le héros, un châtiment, et que, d’ailleurs, toujours accablé sous le souvenir de sa faute, il est dans un rapport indissoluble avec celui qu’il a offensé, qui le punit, et dont il attend le retour.

La réconciliation d’Ahasvérus avec le Christ, la mort du Juif Errant, idée précisément opposée à celle de la légende, est peut-être ce qu’elle pouvait offrir de plus sympathique, surtout à notre époque, et un poète français, M. Ed. Grenier, l’a traitée avec talent. Goethe avait voulu faire un Ahasvérus, et il avait conçu le sujet avec une originalité profonde, en donnant au cordonnier de Jérusalem un caractère très particulier, mélange de bon sens, d’étroitesse d’esprit et d’ironie, qui lui aurait permis d’avoir une attitude personnelle en face de l’humanité qui s’écoule devant lui. Toutefois, après avoir esquissé