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de la moitié en haut sont tous prés les plus beaux et plaisants qu’on puisse imaginer, car tant y sont herbes et fleurs de toutes couleurs et étranges manières et si odorantes que c’est un très grand plaisir. » La Sale fit son ascension le 18 mai (qui correspondait à peu près à notre 1er juin) : c’est en effet le moment où dans les prairies alpestres s’épanouit par centaines cette merveilleuse flore qui fait un des plus grands enchantements de la montagne. Elle n’a pas seulement charmé les yeux du voyageur ; elle a éveillé en lui une curiosité presque scientifique : il décrit minutieusement deux fleurs, le centofoglie et le poliastro, que « les gens du pays serrent en leurs coffres à linge, et font sécher en poudre pour mettre en hiver dans leurs aliments en guise d’épices ». Il a même dessiné ces deux fleurs, et il a joint leur « pourtrait » à celui de la montagne elle-même. Chose singulière, ni les gens du pays, ni les botanistes les mieux renseignés sur la flore de cette région ne connaissent aujourd’hui le centofoglie, ni le poliastro, ni aucune fleur qui ressemble aux deux dessins du vieux livre[1]. Il est cependant probable que La Sale,

  1. Mon ami Pio Rajna, dont je signalerai pus loin la chaleureuse collaboration, a fait dans ce sens des recherches aussi acharnées qu’infructueuses. Je dois dire, toutefois, qu’une femme que j’ai fait causer, à Castelluccio m’a parlé d’une fleur dont on employait la poudre comme le dit La Sale, et a même paru connaître le nom de poliastro ; mais je l’avais interrogée sur le poliastro et son usage, et elle peut fort bien avoir acquiescé par complaisance.