Page:Parnasse de la Jeune Belgique, 1887.djvu/102

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Le narcisse qui naît sous les pieds de l’Élue,
Mère des Jardins clairs que le Seigneur salue
Immaculée ! et les iris, témoins des vaines
Clameurs des eaux, et les glaïeuls et les verveines
Émaillent les gazons limpides des cieux bleus.
Sous les calmes baisers des rayons merveilleux
Qui baisent d’or vos fronts, petits agneaux, agnelles,
Troupeau d’amour, paissez, sans craindre les nielles
Malsaines ni les loups, le parc charmant des rêves !
La Lune, comme un cœur d’or transpercé de glaives
Lumineux, pleure ses trop soyeuses clartés
Pour nos yeux que le mal nocturne des cités
A souillés. Ô chanteuse ! Et ta vague harmonie,
Ces chants angelisés, était-ce l’agonie
D’un songe doux d’azur pleuré sur des cytholes
Que tes longs pleurs faisaient vibrer ? Et les corolles
Ont senti ta rosée en larmes les fleurir
Et leurs lèvres d’amour languissamment souffrir !

Nuit endormeuse et fraîche ! Ô nuit, comme une grève
Chantante, endors les yeux que le monde avilit ;
Berceuse d’âme, endors les âmes que trahit
Le vain regret d’avoir vécu des jours de rêve !

Tâche, ô nuit, de remplir mes yeux inconsolés
De songes comme un vol limpide et lent de cygnes
Qui coupent le ciel noir de leurs blancheurs insignes
Et sèment le pardon sur les cœurs exilés !