Aller au contenu

Page:Pascal - Lettre dédicatoire à Monseigneur le Chancelier, 1645.djvu/19

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

forme, laquelle (bien qu'en état de satisfaire à plusieurs) ne me donna pas pourtant la satisfaction entière : ce qui fit qu'en la corrigeant peu à peu j'en fis insensiblement une seconde, en laquelle rencontrant encore des inconvénients que je ne pus souffrir, pour y apporter le remède, j'en composai une troisième qui va par ressorts et qui est très simple en sa construction. C'est celle de laquelle, comme j'ai déjà dit, je me suis servi plusieurs fois, au vu et su d'une infinité de personnes, et qui est encore en état de servir autant que jamais. Toutefois, en la perfectionnant toujours, je trouvai des raisons de la changer, et enfin reconnaissant dans toutes, ou de la difficulté d'agir, ou de la rudesse aux mouvements, ou de la disposition à se corrompre trop facilement par le temps ou par le transport, j'ai pris la patience de faire jusqu'à plus de cinquante modèles, tous différents, les uns de bois, les autres d'ivoire et d'ébène, et les autres de cuivre, avant que d'être venu à l'accomplissement de la machine que maintenant je fais paraître., laquelle, bien que composée de tant de petites pièces différentes, comme tu pourras voir, est toutefois tellement solide, qu'après l'expérience dont j'ai parle ci-devant, j'ose te donner assurance que tous les efforts qu'elle pourrait recevoir en la transportant si loin que tu voudras, ne sauraient la corrompre ni lui faire souffrir la moindre altération.

Enfin (cher lecteur), maintenant que j'estime l'avoir mise en état d'être vue, et que même tu peux, si tu en as la curiosité, la voir et t'en servir, je te prie d'agréer la liberté que je prends d'espérer que la seule pensée à trouver une troisième méthode pour faire toutes les opérations arithmétiques, totalement nouvelle et qui n'a rien de commun avec les deux méthodes vulgaires de la plume et du jeton, recevra de toi quelque estime et qu'en approuvant le dessein que j'ai eu de te plaire en te soulageant, tu me sauras gré du soin que j'ai