mer, en bataille, etc. ; il n’a pas vu la règle des partis[1], qui démontre qu’on le doit[2]. Montaigne a vu qu’on s’offense d’un esprit boiteux[3], et que la coutume peut tout[4] ; mais il n’a pas vu la raison de cet effet[5]. Toutes ces personnes ont vu les effets, mais ils ne voient pas les causes ; ils sont à l’égard de ceux qui ont découvert les causes comme ceux qui n’ont que les yeux à l’égard de ceux qui ont l’esprit ; car les effets sont comme sensibles[6], et les causes sont visibles seulement à l’esprit. Et quoique ces effets-là se voient par l’esprit, cet esprit est à l’égard de l’esprit qui voit les causes comme les sens corporels à l’égard de l’esprit.
D’où vient qu’un boiteux[7] ne nous irrite pas, et un esprit boiteux nous irrite ? A cause qu’un boiteux reconnaît que nous allons droit, et qu’un esprit boiteux dit que c’est nous qui boitons ; sans cela nous en aurions pitié et non colère.
Épictète demande[8] bien plus fortement pourquoi nous ne nous fâchons pas si on dit que nous avons mal à la tête, et que nous nous fâchons de ce qu’on dit que nous raisonnons mal, ou que nous choisissons mal. Ce qui cause cela, est que nous sommes bien certains que nous n’avons pas
- ↑ « La règle des partis. « Sur la règle des partis, cf. x, 1.
- ↑ « Qui démontre qu’on le doit. » Cf. xxiv, 88.
- ↑ « Qu’on s’offense d’un esprit boiteux. » Voir le paragraphe suivant.
- ↑ « Que la coutume peut tout. » Cf. iii, 8.
- ↑ « La raison de cet effet. » Voir les notes sur v, 2.
- ↑ « Comme sensibles. » Il dit seulement comme sensibles, parce que ce sont des faits moraux qui se voient par l’esprit, ainsi qu’il le dit ensuite.
- ↑ « D’où vient qu’un boiteux. » Mont., III, 8 (de l’Art de conferer), p, 425 : « De vray, pourquoi, sans nous esmouvoir, rencontrons-nous quelqu’un qui ayt le corps tortu et mal basti ; et ne pouvons souffrir le rencontre d’un esprit mal rengé sans nous mettre en cholere ? »
- ↑ « Epictète demande. » Voir les Entretiens d’Épictète recueillis par Arrien, IV, 6.