Page:Pascal - Pensées, 2e édition G. Desprez, 1670.djvu/253

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Qui se considérera de la sorte, s’effrayera sans doute, de se voir comme suspendu dans la masse que la nature lui a donné entre ces deux abîmes de l’infini et du néant, dont il est également éloigné. Il tremblera dans la vue de ces merveilles ; et je crois que sa curiosité se changeant en admiration, il sera plus disposé à les contempler en silence, qu’à les rechercher avec présomption.

Car enfin, qu’est-ce l’homme dans la nature ? Un néant à l’égard de l’infini, un tout à l’égard du néant, un milieu entre rien et tout. Il est infiniment éloigné des deux extrêmes ; et son être n’est pas moins distant du néant d’où il est tiré, que de l’infini où il est englouti.

Son intelligence tient dans l’ordre des choses intelligibles le même rang que son corps dans l’étendue de la nature ; et tout ce qu’elle peut faire est d’apercevoir quelque apparence du milieu des choses, dans un désespoir éternel d’en connaître ni le principe ni la fin. Toutes choses