Page:Pascal - Pensées, 2e édition G. Desprez, 1670.djvu/93

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ge renversement dans la nature de l’homme pour vivre dans cet état, et encore plus pour en faire vanité. Car quand ils auraient une certitude entière qu’ils n’auraient rien à craindre après la mort que de tomber dans le néant, ne serait-ce pas un sujet de désespoir plutôt que de vanité ? N’est-ce donc pas une folie inconcevable, n’en étant pas assurés, de faire gloire d’être dans ce doute ?

Et néanmoins il est certain que l’homme est si dénaturé qu’il y a dans son cœur une semence de joie en cela. Ce repos brutal entre la crainte de l’enfer, et du néant semble si beau, que non seulement ceux qui sont véritablement dans ce doute malheureux s’en glorifient ; mais que ceux même qui n’y sont pas croient qu’il leur est glorieux de feindre d’y être. Car l’expérience nous fait voir que la plupart de ceux qui s’en mêlent sont de ce dernier genre ; que ce sont des gens qui se contrefont, et qui ne sont pas tels qu’ils veulent paraître. Ce sont des personnes qui ont ouï di-