Page:Patriotisme et internationalisme.djvu/20

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par l’épée des âmes qui veulent rester unies. (Très bien très bien ! )

Si nous combattons le militarisme, ce n’est pas pour lui laisser son dernier trophée. Dans nos conflits intérieurs, dans nos grèves, dans nos luttes économiques, nous nous indignons quand le soldat de France est exposé à tirer sur ses frères. Mais à quoi donc sont exposés ceux qui sont enrôlés ailleurs par le militarisme impérial, sinon à tirer un jour sur des frères ?

Voilà pourquoi je tiens à le dire du haut de la tribune. Il n’y a pas dans la conscience socialiste du prolétariat universel une seule protestation contre le régime capitaliste qui ne condamne en même temps par une logique invincible les annexions violentes pratiquées sur des peuples qui n’acceptent pas l’autocratie militaire de l’étranger (Applaudissements à l’extrême gauche.)

Mais ce n’est pas dans la guerre de revanche qu’est la solution. (Nouveaux applaudissements.)

M. Marcel Habert. C’est une protestation platonique alors !

M. Jaurès. La guerre de revanche ne peut avoir d’autres effet que de transformer de nouveau en champ de massacres, de sang et de ruines, les provinces disputées ; elle ne peut avoir d’autre effet, par le renouvellement incessant des luttes, que d’exaspérer ces passions qui aboutissent de part et d’autre à des convulsions sans fin ; elle ne peut avoir d’autre effet que d’imposer à deux peuples à perpétuité, par l’urgence perpétuelle du péril, la dictature militaire, et si la patrie ne périssait pas dans la défaite, la liberté pourrait périr dans la victoire. (Applaudissements à l’extrême gauche.)