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Page:Paul Bourget – L’étape.djvu/140

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L’ÉTAPE

étonné, et, ces étonnements-là, c’est le commencement du doute et de la liberté… Chanut rêve de convertir l’U. T. Et si c’était elle qui le convertissait ?… Car enfin, si quelque chose ressemble à ce qu’étaient à Rome les premiers chrétiens, c’est nous… D’où est-elle sortie, sa religion ? De pauvres petites sociétés d’affranchis et d’esclaves, comme ceux-ci, et de philosophes, comme nous… »

— « Tu oublies la personne du Christ, » interrompit Jean.

Crémieu-Dax regarda son compagnon presque du même regard qu’il avait eu pour lui demander : « Tu apportes ta démission ?… » Une autre interrogation lui vint au bord des lèvres, qu’il ne formula point. Décidément, il ne voulait pas aborder avec Monneron un certain sujet, car, au lieu de relever ces mots, qui appelaient une controverse, il se mit à expliquer, avec sa lucidité ordinaire, les motifs qu’avait chacun des cinq membres qui composaient avec eux deux le comité de la Tolstoï, pour voter contre la conférence de l’abbé Chanut ou en sa faveur :

— « Trois contre trois, » finit-il par conclure. « C’est donc Rumesnil qui nous départagera. Que t’a-t-il dit ? »

— « Je ne l’ai pas vu, » répondit Jean. « Il est venu pendant que je n’y étais pas… »

— « Ah !… » fit simplement Crémieu-Dax. Puis, d’une voix un peu plus rapide et comme pour corriger cette involontaire expression d’é-