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Page:Paul Bourget – L’étape.djvu/167

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L’UNION TOLSTOÏ

lectuelle, c’est qu’il avait ses motifs secrets…

— « C’est Rome qui nous vise, Rome qui veut se glisser chez nous, pour microber nos vierges énergies révolutionnaires. Vous y préterez-vous, camarades, vous qui en avez assez de voir, dans l’inégalité sociale, les rires et les pleurs chevaucher botte à botte, et qui connaissez tout le programme des Jésuites et de la démocratie chrétienne : panser les plaies saignantes du prolétariat avec de la charpie narcotisée, pour qu’il se rendorme dans la léthargie comateuse des esclaves à jamais décérébrés ? »

Il y avait quelque chose de tragique dans le grotesque et si sincère effort de ce primitif qui avait peiné héroïquement pour aboutir à ce résultat « maupiteux », — c’est le cas de lui emprunter ce vieux mot d’un archaïsme expressif. — Rien que les vocables médicaux, dont il abusait avec cette bouffonne gaucherie, supposaient tant d’ingénue patience pour les avoir classés dans sa mémoire rebelle ! Que cette passion de s’instruire eût été canalisée et endiguée dans une voie résolument professionnelle, et Boisselot fut sans doute devenu, avec sa patience et son intelligence, un ouvrier supérieur, tandis qu’il n’était qu’un bourgeois inférieur. — Mais, si tous ne sont pas appelés à tout apprendre, où est la Justice ? — D’ordinaire, et comme s’ils eussent reconnu eux-mêmes que la logique de la Cause les y contraignait, les lettrés tels que Crémieu-Dax, les savants tels que Bobetière, acceptaient, sans en sourire, cette phraséo-