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L’OBSTACLE

l’ordre des phénomènes et qu’elle se heurte, aussitôt qu’elle veut chercher le pourquoi des choses, au lieu du comment, à l’inconnaissable. J’admets que cet inconnaissable est réel, puisqu’il est à la racine de toute réalité. J’admets que, le conséquent étant enveloppé dans l’antécédent, cet inconnaissable doit posséder, virtuellement au moins, tout ce qui constitue le réel, donc, puisque nos facultés font partie du réel : l’intelligence, l’amour et la volonté. J’admets encore que ce principe d’intelligence, d’amour et de volonté, caché dans l’inconnaissable, c’est ce que le langage des simples appelle Dieu. J’admets que ce Dieu, ainsi conçu, doit s’être manifesté dans l’histoire humaine. Comme cette histoire n’est pas une attente, qu’elle est actuelle, qu’elle est présente, j’admets que cette action de l’inconnaissable y est mêlée, actuellement. J’admets que de tous les faits qui tombent sous l’observation, le christianisme est celui qui remplit le plus exactement les conditions que notre raisonnement nous montre à priori, comme ayant dû être celles d’une action divine. Je vais plus loin. Je reconnais que, des formes diverses du christianisme, la plus complète est celle qui remonte par la tradition au fondateur et à ses apôtres, c’est-à-dire le catholicisme. J’admets tout cela, mais comme une construction intellectuelle qui me reste totalement extérieure, et dont je ne me sens pas faire partie. C’est une hypothèse plus ingénieuse, plus probable, si vous voulez, que beaucoup d’autres, mais cette proba-