Aller au contenu

Page:Paul Féval L'Homme de fer.djvu/102

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

veau la draperie de la tente et introduisit en grande cérémonie un homme, vêtu de ce manteau fleurdelisé que le roi de France et les rois d’armes avaient seuls le droit de porter.

Celui-ci était Montjoie, le roi d’armes. Et il venait convier le duc de Bretagne aux joutes et tournois qui devaient avoir lieu, ce jour-là même, ès grèves de la Rive, entre le mont Saint-Michel et la terre ferme.

Le duc tendit son verre à Fier-à-Bras quand le hérault fut parti.

— Monseigneur a refusé le collier de Saint-Michel, dit Monsieur Tanneguy, monseigneur peut bien décliner l’assignation du roi qui vient tardivement, ce me semble.

— Es-tu déjà Français, pour ce qu’on veut te donner l’ordre de Saint-Michel, mon cousin Tanneguy ? demanda François entre deux gorgées.

Tanneguy du Chastel se redressa, mais ne répliqua point. Il y eut un murmure parmi les barons de Bretagne qui tous vénéraient cette vaillante barbe grise. Dunois s’écria :

— Nous irons, par notre Dame ! n’est-ce pas, monseigneur ? Mais nous irons en armes et en force !

— Nous irons, répliqua le duc François qui repoussa d’une main son verre et tendit l’autre à Monsieur Tanneguy. Mon cousin, je n’ai point voulu vous offenser.

Fier-à-Bras fit signe à Jeannin ; Jeannin s’avança au milieu du cercle.

— Monseigneur, dit-il, répétant laborieusement la leçon que le nain lui avait faite, je suis l’écuyer de Kergariou que le Maudit a dessein d’épargner. Que monseigneur prenne mes armes et mon cheval, il ira aux joute, sans courir aucun danger.

Il y eut un grand silence dans la tente du duc de Bretagne. Tous les barons baissèrent les yeux comme s’ils eussent craint de s’entre-regarder. Le rouge monta au visage de Dunois ; le duc François, au contraire, malgré de nombreuses rasades, avait au front une nuance de pâleur.

— Notre seigneur n’a point d’héritier en son palais de