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Page:Paul Vibert - Mon berceau, 1893.djvu/194

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MON BERCEAU

effacé l’image de la Rigolboche dans le souvenir des vieux messieurs.

Dernièrement, très tard, après avoir corrigé un article qui m’avait retenu outre mesure, j’entrais dîner dans la salle Montesquieu, convertie en bouillon Duval, comme l’on sait, et, machinalement je me mis à une petite table de côté, dans les boxes du premier étage qui courent tout autour de la salle et qui avaient été construites tout exprès pour le flirt des amoureux, à l’époque du bal.

Un vieux monsieur en face de moi finissait lentement de dîner, d’où je conclus que son râtelier fonctionnait mal.

Décoré, très correctement mis, avec un transparent irréprochable à son gilet, un cabochon étincelant à sa cravate et un autre plus gros au petit doigt, il avait bien l’air d’une vieille ruine ambulante, dont les lézardes étaient artistement dissimulées par les cosmétiques ; il sentait bon et son 1830 d’une lieue de loin.

Très chauve, une couronne minuscule de cheveux entourait sa tête et ces pauvres oubliés étaient passés au petit fer, la moustache était coupée courte au-dessus de la lèvre ; inutile d’ajouter que cheveux et barbe étaient d’un noir