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Vous me croyez bien loin de mon sujet, au contraire, Messieurs, j’y suis en plein et j’ai l’honneur, moi, pauvre petit déjà poney, ce qui ne veut pas dire que je raisonne comme un cheval, de vous apporter la seule explication plausible de la Voie lactée. Il s’agit là simplement de planètes qui sont percées à jour comme de simples écumoires, parce que les rats ont anéanti toute la faune à leur surface et sont devenus les seuls maîtres des dits globes terraqués, comme disent les malins. Et voilà, Messieurs, j’ai fini…

Naturellement, l’assemblée, fortement estomaquée, et surtout par simple politesse, ne trouva rien à répondre, mais elle eut beau individuellement et in petto traiter le savant japonais de vieille bête et de noble ganache, elle n’en fut pas moins impressionnée et, à part elle-même, elle ne pouvait s’empêcher de murmurer :

— Mais si c’était vrai tout de même ! Et si même l’histoire de la planète rongée par les rats n’était qu’une fable du vieux Japonais, abusé par la fumée de l’opium, il pourrait bien se faire tout de même que Paris, un jour ou l’autre, fût la proie des terribles rongeurs et alors c’en serait vite fait de la France entière, de l’Europe, de l’Asie et même de l’Afrique, car ils sauraient bien passer le canal de Suez à la nage.

— Moi, dit un vieux paléographe, je sais qu’il y en a plein mon église.

— Et moi, plein ma cave, dit un économiste.