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Ainsi elle avait des chiens pour deuil et c’est comme cela que toutes les jeunes veuves venaient lui acheter des caniches noirs.

Elle fournissait des caniches blancs superbes et immaculés aux jeunes mères qui avaient voué leurs enfants au blanc et au bleu. Elle vendait ces chiens fort cher et les clientes n’y voyaient que la dernière couleur.

Pour les dames mondaines ou les nobles étrangères un peu excentriques, elle avait, cette excellente madame Poilras, d’adorables petits épagneuls où havanais dont la teinte jaune s’harmonisait délicieusement avec le chignon carotte de la propriétaire.

Il y avait même de très grandes dames qui tenaient à avoir des chiens blancs et noirs mélangés pour demi-deuil, quand la date du décès du bien-aimé commençait à s’éloigner.

Enfin, les couleurs de chiens ou les chiennes de couleurs s’adaptaient parfaitement à la variété infinie des toilettes féminines. Une toilette à petits carreaux blancs et noirs, ou en grisaille, allait fort bien avec la jolie teinte gris-fer d’un danois.

Elle avait même inventé le chien tricolore pour cette bonne Gyp et les nationalistes !

Je pourrais multiplier longtemps mes exemples. Je m’arrête et que mes lecteurs sachent seulement comment en substituant la couleur à la race, dans la vente de ses chiens, la bonne madame Poilras a trouvé le moyen d’élever très confortablement sa jolie petite famille, malgré son grand appétit…