Page:Paul de Musset - Course en voiturin, Italie et Sicile, 1845, 1.djvu/255

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trouva signée au milieu d’un nouveau déluge de pleurs.

L’idée me vint alors qu’en élevant cette pauvre fille au-dessus de sa condition et en voulant lui imprimer des sentiments qu’elle ne pouvait comprendre, je la rendais plus malheureuse qu’elle n’aurait dû l’être. Ne valait-il pas mieux en faire la femme d’un ânier que de l’exposer à commettre un crime ? Cette pensée changea mes résolutions. J’envoyai chercher Meneghe ; il arriva tremblant de tous ses membres, comme si on l’eût mené à l’échafaud. Quand je lui annonçai mon intention de lui accorder la main de ma fille, il s’imagina qu’on le mystifiait de la manière la plus cruelle avant de le punir. Cependant sa défiance fut vaincue lorsque je lui mis dans la main une bourse garnie de grosses piastres sonnantes, en lui commandant de revenir le lendemain, propre et vêtu comme un signor, pour sa visite de présentation. Il me répondit avec un calme diplomatique et majestueux qu’il se conformerait à mes ordres, et sortit à reculons