Page:Pavlovsky - En cellule, paru dans Le Temps, 12, 19 et 25 novembre 1879.djvu/44

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La vieille se prit à me consoler — elle me parlait doucement, simplement, d’une voix si calme, d’une voix d’aïeule s’efforçant de ramener un de ses petits-enfants à la raison. Et à travers ses réprimandes mêmes j’entendais quelque chose de si bon, de si tendre, quelque chose qui venait en droite ligne du cœur. J’aurais voulu l’écouter encore et toujours… Elle conclut en disant :

— Notre tour, à nous, viendra un jour, mon fils !

— Dieu le veuille, grand’mère !

En ce moment j’entendis venir quelqu’un. La vieille se recula vivement dans l’ombre pour se rapprocher de la porte l’instant d’après.

J’entendis le cliquetis de sous s’entre-choquant :

— Voilà, dit-elle, je les mets derrière le lave-mains, tu achèteras du pain avec…

Je ne refusai pas. Je savais que la mendiante, la vagabonde, la voleuse qui sait ? me donnait de tout cœur ce qu’elle pouvait.

À l’étage où je me trouvais, il y avait quelques détenus pour délits de droit commun : ces gens étaient plus heureux que moi, on leur permettait de sortir à volonté de leurs cellules qui n’étaient jamais fermées à clef.

Je trouvais cinq copecks et un grosch[1] derrière le lave-mains.

  1. 5 copecks ― 2 sous. Un grosch ― 1/3 de copeck à peu près.