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ROSEMONDE GÉRARD




De même qu’autrefois Mme de Genlis, son arrière-grand’mère, jouait de la harpe et ravissait toute la cour par la grâce tendre, l’élégance et la légèreté de son jeu, Mme Rosemonde Gérard a modulé de nos jours, sur d’harmonieux pipeaux, une chanson ailée, scintillante, touchante et mélancolique, qui a ravi tous ceux qui l’ont entendue, c’est-à-dire tout le monde.

Est-il plus jolie destinée littéraire que celle de Mme Rosemonde Gérard ?… Toute jeune, à l’aurore de la vie et de l’amour, elle publie ces « Pipeaux » qui prennent place parmi ce que la poésie féminine nous a donné de plus frais et de plus charmant : une tendre gloire qui ne manquera pas de grandir sans cesse, lui semble promise… et cependant les pipeaux se taisent et cette jeune renommée prend plaisir à s’abolir dans l’éclat d’une gloire tout à coup magnifiquement rayonnante.

Louis PAYEN.




LE DERNIER RENDEZ-VOUS


Lorsque tu seras vieux et que je serai vieille,
Lorsque mes cheveux blonds seront des cheveux blancs,
Au mois de mai, dans le jardin qui s’ensoleille,
Nous irons réchauffer nos vieux membres tremblants.
Comme le renouveau mettra nos cœurs en fête,
Nous nous croirons encor de jeunes amoureux,
Et je te sourirai tout en branlant la tête,
Et nous ferons un couple adorable de vieux ;
Nous nous regarderons assis sous notre treille,
Avec de petits yeux attendris et brillants,
Lorsque tu seras vieux et que je serai vieille,
Lorsque mes cheveux blonds seront des cheveux blancs.

Sur le banc familier, tout verdâtre de mousse,
Sur le banc d’autrefois nous reviendrons causer ;