Page:Peguy oeuvres completes 01.djvu/147

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annonça qu’elle avait une fluxion de poitrine, elle en reçut la nouvelle comme l’annonce et la promesse du tout proche bonheur éternel. Elle entra en béatitude. La fluxion de poitrine l’emporta au bout de ses neuf jours, comme tout le monde. Je crois qu’elle fut sérieusement complice de sa mort. Elle était profondément malheureuse et chrétienne. J’en conclus que les chrétiens peuvent avoir une soif religieuse et faire un commencement d’exécution de cette mort que nous redoutons.

— Cette conclusion générale me paraît admissible, mais seulement parce qu’elle n’engage que les possibilités. Je suis d’accord avec vous que beaucoup de chrétiens sans doute ont ainsi désiré le ciel jusqu’à faire un commencement d’exécution, — involontaire et parfois presque volontaire — de leur mort individuelle. Mais je ne vous accorderais pas que cette conduite soit proprement chrétienne. J’ai peur, mon ami, que vous n’ayez mal entendu la Prière pour demander à Dieu le bon usage des maladies. J’ai peur que vous n’ayez interprété cette soumission parfaite comme je ne sais quelle complaisance, quelle facilité à la mort, comme une complicité. Vous avez tellement peur de la mort que ceux qui n’en ont point cette peur vous paraissent en avoir le désir. La position de ce chrétien géomètre était, comme il convient, rigoureusement exacte. Avez-vous cette petite édition des Pensées où vous avez lu le texte ? Merci. Vie de Blaise Pascal, par madame Périer (Gilberte Pascal), sœur aînée de Pascal, —

— Histoire un peu favorable —

— Histoire où transparaît la piété fraternelle, presque un peu maternelle, sévère comme en ce temps, chrétienne et janséniste.