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INTRODUCTION

de la Quinzaine. Le volume au devant duquel j’écris ces lignes rassemble quelques-uns de ceux du début.



5 janvier 1900. C’est la date du premier Cahier.

Les vibrations de l’Affaire n’ont pas fini de s’éteindre. On vient de vivre des mois, des années en bataille. On n’a pas perdu l’habitude, pour ne pas dire le goût des invectives. « En ce temps-là nous finissions tous par avoir un langage brutal. » Et un peu plus tard, en mars 1900 encore : « On doit toujours dire brutalement. »

Ce qu’on doit dire brutalement, est-il besoin de le répéter, c’est la vérité.

« Qui ne gueule pas la vérité, quand il sait la vérité, se fait le complice des menteurs et des faussaires. » Et l’antienne revient :

« Nous demandons simplement qu’on dise la vérité ! »

Quelle stupeur, quelle indignation s’il s’aperçoit que les compagnons de la veille empruntent aux adversaires contre lesquels on avait de concert si ardemment combattu les procédés hier flétris !

« Nous avons passé vingt mois et plus à distinguer et à faire distinguer la vérité d’État de la vérité. »

« Nous fûmes les chercheurs et les serviteurs de la vérité. Telle était en nous la force de la vérité que nous l’aurions proclamée envers et contre tous. Telle fut hors de nous la force de la vérité qu’elle nous donna la victoire… À présent que la vérité nous a sauvés, si nous la lâchons comme un bagage embarrassant, nous déjustifions notre conduite récente, nous démentons nos paroles récentes, nous

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