Page:Peguy oeuvres completes 02.djvu/182

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20 novembre où il sauva le ministère de M. Combes, il tomba surtout, sinon le ministère même de M. Waldeck-Rousseau, du moins un ministère waldeckiste ; je vois qu’on s’en est beaucoup félicité autour de nous ; ces débats politiques parlementaires sont beaucoup trop savants pour que j’y puisse participer ; mais il me semble que tous ces politiques parlementaires, prétendus socialistes, prétendus dreyfusistes, ont la mémoire courte ; car j’ai au contraire une mémoire extrêmement longue, et anormale, qui peut remonter jusqu’à plusieurs années en arrière ; donc j’ai connu un temps où tous ces politiques parlementaires, dont nous n’avons jamais été, qui se gaudissent aujourd’hui de M. Waldeck-Rousseau, se jetaient à ses pieds et le suppliaient d’accepter le pouvoir ; et en ce temps-là, qui eût proposé de confier le gouvernement de la République à M. Combes, on l’eût embarqué directement pour Charenton.

Ayant toute sa vie fait tomber obstinément des ministères dont les torts aujourd’hui ne nous apparaissent plus qu’atténués par l’éloignement et par un certain oubli, M. Clemenceau soutient aujourd’hui opiniâtrement le ministère qui depuis trente ans de République au moins nominale a fait le plus de tort je ne dis pas à la justice, à la vérité, à la liberté, à l’humanité en France, à la culture, au dreyfusisme, au socialisme, à la Révolution, à l’acratisme, je dis à la simple République.

Je n’ai aucune illusion sur le ministérialisme politique parlementaire de M. Clemenceau ; M. Clemenceau est beaucoup trop intelligent pour croire lui-même aux raisons qu’il nous apporte et qu’il nous présente en faveur,