Page:Peguy oeuvres completes 02.djvu/334

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

contre l’entraînement formidable de l’image et du rythme : et alors, sous la furieuse colère apparente et réelle, sincère, contre Napoléon III et contre le deuxième ou le Second Empire, ainsi que les nomme simultanément l’arithmétique officielle, aisément vous sentirez une plénitude secrète, l’intime satisfaction du fabricant, le contentement du poète, que ce vieux Napoléon premier permît à cet unique Victor Hugo de sortir de tels vers.

Officiellement donc il fallait, comme tout bon populaire, proscrire, exterminer, maudire Napoléon. Mais dans le dedans du poète, on en profitait pour faire des vers comme pas un. En réalité Victor Hugo poète, — et qu’est-ce que Victor Hugo en dehors de Victor Hugo poète, — Victor Hugo poète ne sortit jamais du culte napoléonien. Le véritable Napoléon, c’est le Napoléon où l’on rythme. Et dans les Châtiments même, dans les Châtiments autant et plus que nulle part, on sent courir une veine de contentement intérieur, d’avoir tant et si bien fait servir Napoléon premier.

Ce Napoléon premier qui sans doute en lui-même se vantait de ne jamais servir. Et qui avait passé sa vie à tant se servir des autres.

Non seulement, comme son peuple, naïvement nationaliste et prétentieusement internationaliste, mais plus particulièrement militariste prétentieux et pacifiste également prétentieux : mais cela s’accorde fort bien ensemble.

Non seulement dans les œuvres où c’était pour ainsi dire son métier de s’en servir, dans les œuvres publiques, politiques, sociales, militaires, historiques, po-