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II

À Rome, où du sénat hérite le conclave,
À l’Elbe, aux monts blanchis de neige ou noirs de lave,
Au menaçant Kremlin, à l’Alhambra riant,
Il est partout ! — Au Nil je le retrouve encore.
L’Égypte resplendit des feux de son aurore ;
Son astre impérial se lève à l’orient.

Vainqueur, enthousiaste, éclatant de prestiges,
Prodige, il étonna la terre des prodiges.
Les vieux scheiks vénéraient l’émir jeune et prudent ;
Le peuple redoutait ses armes inouïes ;
Sublime, il apparut aux tribus éblouies
Comme un Mahomet d’Occident.

Leur féerie a déjà réclamé son histoire.
La tente de l’Arabe est pleine de sa gloire.
Tout Bédouin libre était son hardi compagnon ;
Les petits enfants, l’œil tourné vers nos rivages,
Sur un tambour français règlent leurs pas sauvages,
Et les ardents chevaux hennissent à son nom.

Il est difficile de vérifier ces renseignements de géographie et d’histoire. Et d’histoire naturelle. Mais il y a là, cette fois, son Napoléon tout entier.

Parfois il vient, porté sur l’ouragan numide,
Prenant pour piédestal la grande pyramide,
Contempler les déserts, sablonneux océans ;
Là, son ombre, éveillant le sépulcre sonore.
Comme pour la bataille y ressuscite encore
Les quarante siècles géants.