Page:Peguy oeuvres completes 05.djvu/308

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Et pourtant on est si fier d’avoir des enfants.
(Mais les hommes ne sont pas jaloux).
Et de les voir manger et de les voir grandir.
Et le soir de les voir dormir comme des anges.
Et de les embrasser le matin et le soir, et à midi.
Juste au milieu des cheveux.

Quand ils baissent innocemment la tête comme un poulain qui baisse la tête.

Aussi souples comme un poulain, se jouant comme un poulain.
Aussi souples du cou et de la nuque. Et de tout le corps et du dos.
Comme une tige bien souple et bien montante d’une plante vigoureuse.
D’une jeune plante.
Comme la tige même de la montante espérance.

Ils courbent le dos en riant comme un jeune, comme un beau poulain, et le cou, et la nuque, et toute la tête.

Pour présenter au père, au baiser du père juste le milieu de la tête.

Le milieu des cheveux, la naissance, l’origine, le point d’origine des cheveux.

Ce point, juste au milieu de la tête, ce centre d’où tous les cheveux partent en tournant, en rond, en spirale.

Ça les amuse ainsi.
(Ils s’amusent tout le temps).
Ils s’en font un jeu. Ils se font un jeu de tout.

Ils chantonnent, ils chantent des chansons dont on n’a seulement pas idée et qu’ils inventent à mesure, ils chantent tout le temps.