Page:Peguy oeuvres completes 05.djvu/366

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Que d’entendre sa parole autrement qu’il ne l’a dite.
Que d’écouter même autrement qu’il n’a parlé.

C’est même la plus grave tromperie que nous puissions lui faire.

Que de le recevoir autrement, contrairement qu’il ne s’est donné.

C’est la plus grave injure, peut-être la seule injure que nous puissions lui faire.

Une couronne a été faite une fois : c’était une couronne d’épines.
Et le front et la tête ont saigné sous cette couronne de dérision.
Et le sang perlait par gouttes et le sang s’est collé dans les cheveux.

Mais une couronne aussi a été faite, une mystérieuse couronne.
Une couronne, un couronnement éternel.
Toute faite, mon enfant, toute faite de souples rameaux sans épines.
De rameaux bourgeonneux, de rameaux de fin mars.
De rameaux d’avril et de mai.
De rameaux flexibles et qui se tressent bien en couronne.
Sans une épine.
Bien obéissants, bien conduits sous le doigt.
Une couronne a été faite de bourgeons et de boutons.

De bourgeons de fleurs comme un beau pommier, de bourgeons de feuilles, de bourgeons de branches.

De bourgeons de rameaux.