Page:Peguy oeuvres completes 05.djvu/429

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Peuple de pépiniéristes, pays de roseraies, peuple scrupuleux.
Peuple patient, qui as la patience (et le goût) de désherber.

Peuple qui ne cesses point de désherber. Plus vite et plus constant et plus infatigable que la nature même.

Plus penché sur la terre, plus courbé, plus penché à désherber, toi qui vas plus vite et qui es plus constant et plus infatigable à désherber

Que la mauvaise herbe à pousser (et ce n’est pas peu dire)
Que la mauvaise nature même à faire pousser la mauvaise herbe

Peuple qui suffis plus à arracher la mauvaise herbe que la mauvaise nature à la faire pousser.

(Et ce n’est pas peu dire. Si quelqu’un le sait, c’est moi).

Peuple plus opiniâtre, plus patient, plus recommençant que la mauvaise nature même.

Quand je regarde tes champs j’ai beau regarder je n’y vois pas une mauvaise herbe.

Ni un chardon pour les ânes. Ni cette ivraie que mon Fils nommait la zizanie

Et qui lui servit beaucoup pour ses similitudes. Un homme avait deux fils.

Et que vous autres vous nommez de l’ivraie et du chiendent.
Peuple laborieux quand je regarde tes champs.
Ni dans tes moissons cette affreuse maladie.
Quand les blés ont la maladie. Et surtout les seigles.
Cet ergot, cette carie du seigle, cette affreuse