Page:Peguy oeuvres completes 05.djvu/452

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Une ronde, une danse, les nuits se prennent la main
Par dessus le jour, du matin au soir
Du bord du matin à celui du soir, se penchant l’une vers l’autre.
Celle qui descend du jour précédent se penche en arrière
Celle qui monte
Du jour suivant
Se penche en avant
Et les deux se joignent, joignent leurs mains,
Joignent leur silence et leur ombre
Et leur piété et leur auguste solitude
Par dessus les bords difficiles
Par dessus les bords du laborieux jour.
Et toutes ensemble, ainsi se tenant la main,
Débordant par dessus les bords, les poignets liés
Aux poignets toutes les nuits l’une après l’autre
Ensemble forment la nuit et les jours l’un après l’autre

Ensemble ne forment pas le jour. Car ils ne sont jamais que des maigres jours

Qui ne se donnent pas la main. Or de même que la vie
Terrestre
En grand (si je puis dire) n’est qu’un passage entre deux bords
Une ouverture entre la nuit d’avant et la nuit d’après
Un jour
Entre la nuit de ténèbres et la nuit de lumière
Ainsi en petit chaque jour n’est qu’une ouverture.
Un jour.
Non pas seulement entre la nuit d’avant et la nuit d’après.
Entre les deux bords.