G L I
Notez que l'auteur croit et veut faire tout autre chose. (Mais souvent c'est le génie même). (Moins toutefois qu'on ne l'a dit). Il est homme de théâtre. Il travaille pour le théâtre. Il sait son métier. Il a fait une comédie. Il fait un drame (Sans compter quelques broussailles). Il fait donc une pièce. Il sait faire une pièce. Il pense à l'intrigue, à nourrir l'intrigue, à la retordre, à la faire jouer. Il pense aux personnages, (c'est-à-dire souvent aux spectateurs, comme modèles, comme spectateurs ; comme juges; et comme payants; payant en argent, payant en gloire, payant, nous l'avons vu, il le sait, en postérité même). (En mémoire). Il pense à tout, c'est son métier. Aux décors. Aux entrées. Aux sorties. Ace qui arrive dans la pièce. Il pense à son talent. Il pense évidemment aussi, il pense évidemment partout au suc- cès des deux précédentes pièces, dont il était l'auteur, au succès de ses deux (anciennes) comédies. Et ce qu'il y a de fort, ce qu'il y a d'unique, c'est que nous pensons constamment à autre chose.
Nous pensons peut-être précisément à ces anciennes comédies. Mais nous pensons surtout. Entendant, lisant la pièce dans une sorte de double opération, dans une sorte de double mémoire nous les voyons doubles ses personnages et sans même nous en apercevoir nous nous disons : C'est donc là le comte, et c'est donc là Rosine. Et cest donc là Suzanne et cest donc là Figaro.
La fortune de cette pièce est unique. Tout avait con- couru à faire de ces personnages pour ainsi dire des
127
�� �