Page:Peguy oeuvres completes 08.djvu/214

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

ŒUVRES POSTHUMES

Toutefois laissons cela, dit-elle. Nous n’en sommes pas là. Je n’ai pas affaire aujourd’hui à votre âme chrétienne. J’ai affaire à votre âme païenne, parce que je le veux, et à votre âme moderne, parce que je ne peux pas faire autrement. Les modernes veulent voir un faisceau de lumière, un faisceau de regard, un faisceau de considération, un faisceau de jugement dont ils sont en même temps la pointe et l’objet et qui partirait, sur eux, vers eux, d’une base indéfiniment accrue.

C’est beaucoup d’honneur. C’est trop. Généralement les faisceaux lumineux ne partent point d’une base indéfiniment accrue pour se concentrer merveilleusement vers un centre, sur un point qui serait géométriquement comme un point d’origine. Physiquement et géométriquement les faisceaux lumineux partent généralement d’un point d’origine et comme un balai se promènent sur des surfaces, sur des aires à volonté indéfiniment croissantes. Ou encore comme un pinceau. Il n’en va pas autrement de ce faisceau lumineux temporel pour ainsi dire qu’est le regard d’une génération vers et sur une génération précédente. La génération appelante se voit seule comme une pointe. Et elle voit toutes les générations ultérieures comme une immense base, comme une base indéfiniment croissante. Elle voit le regard sur elle de cette immense base. Or c’est exactement le contraire qui se produit.

L’inverse et il faut même dire le renversé.

C’est le contraire. Cette génération présente, cette

204

�� �