Page:Peguy oeuvres completes 08.djvu/255

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

G L I

cer la science, pour soutenir les carrières. Mais il s'effondrerait si on lui apportait tout. Et il serait bien malheureux si on lui en apportait seulement beau- coup. Voyons, Péguy, dit-elle, vous savez très bien comment ça se passait à l'École Normale et comment on y formait un bon historien antique, je veux dire un bon historien du monde antique, un bon historien de l'antiquité. Enfin vous vous rappelez Bloch. Ou Block. On l'appelait le gros Bloch. Il était gros en effet, mais à une condition. C'est que son histoire ne fût pas grosse. Eh bien rappelez-vous le gros Bloch. On profitait de ce qu'on n avait pas de documents. On profitait de ce qu'on manquait de documents pour faire l'histoire. Tout était retourné, tout chancelait si par malheur une masse de documents était tombée là dedans. Quand un historien du monde antique trouve un paquet de docu- ments sur le monde antique, (cela se voit), descolonnes, des plaques, des tombeaux, des papyrus, des cirques, des temples et autres mortuaires archéologies, des théâtres et amphithéâtres c'est fort heureux, dit-elle. (J'acquiesçais déjà. Elle se reprit) : Eort heureux pour lui, dit-elle, car sa carrière est faite. C'est l'Institut. Mais en ce faisant il n'est pas très heureux pour l'his- toire ; il n'est pas très heureux pour les historiens ; je veux dire il n'est pas très aimable pour ses collègues. Car il fiche généralement par terre (tout) ce que l'on avait trouvé avant lui sur les mêmes points, ce que ses prédécesseurs et ses collègues avaient établi, avaient péniblement, savamment échafaudé, ce qui était assis

245

�� �