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Page:Pelletan – Le Droit de parler, 1862.pdf/45

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Que le gouvernement plutôt, placé si haut, comme il l’est dans son opinion, au-dessus du murmure de la journée, ose enfin avoir la conscience de sa force et dire une fois pour toutes à la France : « Parlera qui voudra, écrira qui voudra, dans la limite de la loi, sans que j’aie à mettre la main sur aucune opinion et à prendre parti pour aucune idée. Je ne suis pas un pape, ni un dogme imposé à la conscience, au nom de l’infaillibilité. Je suis encore moins un chef d’école ou le missionnaire armé d’une idée ! Je règne également sur tous, pour garantir également à tous leur droit inné de doctrine ou de croyance. Je laisse à la raison publique, seule juridiction compétente en cette matière, la prétention de distinguer la vérité de l’erreur ; et, quant au reste, c’est-à-dire le jugement au jour le jour de la politique courante, le bien que je fais selon mon idée et que je ferai encore, écrit d’avance dans le bien que j’ai déjà fait, me défendra et défendra ma conduite devant l’opinion. Si cette défense ne suffit pas, aucune autre n’aurait plus de succès. Un peuple marqué au sceau d’une pareille ingratitude ne mériterait pas plus d’être enchaîné que d’être gouverné. Ce ne serait que le rebut de l’histoire. Il faudrait l’abandonner à son destin. »

En parlant ainsi, le gouvernement donnerait à la France une marque d’estime. La proclame qui voudra indifférente à sa propre dignité. J’ai mis, moi aussi, la main sur son cœur, et je ne l’ai pas trouvé si tiède à la liberté que le parti servile veut bien le supposer. On répète souvent autour de moi que la liberté peut convenir tout au plus à la Belgique. Chaque fois que le