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voie publique. Je dois encore mentionner, pour mémoire, les corps emportés par la Seine. Un reporter d’un journal conservateur, qui, en suivant les quais, s’était mis à compter les cadavres flottant à la surface de l’eau, appela plaisamment cet exercice la « pêche aux fédérés ». La « pêche » était assez fructueuse, cela se conçoit ; beaucoup d’exécutions avaient lieu sur la berge du fleuve : on a vu que des fossés y ont été creusés pour enterrer les victimes, il était fort simple de s’épargner cette peine en jetant les corps à l’eau.

Restent les morts qui périrent hors Paris : ceux qu’on fusilla dans les fossés des fortifications, ceux qu’on tua sur la route de Paris à Versailles, surtout ceux de Satory, assurément les plus nombreux. Il faut y ajouter encore les malheureux fusillés au bois de Boulogne, dans la période qui suivit la semaine de Mai.

C’est, je crois, s’aventurer que de fixer un chiffre précis. Cependant on peut, avec les renseignements qui précèdent, se faire une idée de l’étendue du massacre. Je ne m’arrêterai plus à discuter le chiffre de 6,000 morts donné par M. Maxime Ducamp : ce chiffre ressemble à une plaisanterie déplacée. Mais si l’on discute, d’après les données qui précèdent, le chiffre, en quelque sorte officieux, de 17,000 (c’est, m’a-t-on dit, celui des chefs de corps), on verra qu’il est manifestement de beaucoup inférieur à la vérité.

De quelque façon qu’on réduise le chiffre des cimetières, qui peut monter à plus de 17,000, il est, je crois, impossible de le mettre au-dessous de 12,000 à 14,000. Il faut au moins en admettre à peu près autant pour les tranchées creusées hors Paris, les casemates, les carrières d’Amérique, etc. En prenant ce minimum pour des fosses communes si vastes, et où l’on porta les victimes de quelques-uns des massacres les plus meur-