Page:Pelletan - Le Monde marche.djvu/184

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part de race enchaînée au pied porter la tête rase de l’esclave. Mais peu importe une erreur de détail, prenons de plus haut la question.

Pour vous comme pour moi, bien certainement, la félicité publique consiste, au point de vue du progrès, dans une production sans cesse croissante de richesse et une meilleure répartition de la richesse produite. Y a-t-il aujourd’hui croissance de richesse ? Y a-t-il meilleure répartition ? Vous contestez le premier point, vous accordez le second ; la même somme de bien-être, dites-vous, est le partage de chaque société. Si j’avais eu à faire un choix entre l’une ou l’autre hypothèse, je l’aurais plutôt fait à l’inverse, car l’histoire constate peut-être d’une façon plus irrécusable la crue incessante du bien-être dans la société, que la justice distributive de la répartition.

Vous accorderez, je pense, que l’homme en entrant pour la première fois dans la vie en commun, sous un toit, derrière un mur de cité, ne trouva pas pour cela du premier coup une terre partout aménagée d’avance autour de lui, comme par un farfadet invisible, pour la commodité de sa civilisation. Pas un champ défrichée ni une branche d’arbre coupée, ni un morceau de fer forgé, ni une route tracée, ni un pont bâti, ni une vigne plantée, ni une toile tissée, ni une amphore moulée, ni une citerne creusée, ni un cheval dompté, ni un bœuf lié à la charrue. Il avait donc à entreprendre, dès le premier jour, pour mettre la nature en harmonie avec sa