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INTRODUCTION — DU BEAU ET DE L'ART

relâche à l’étude des arts et à l’éducation du goût, c’est un bien, c’est un plaisir digne de l’âme, et tout ce qui peut procurer cette noble culture est un bienfait pour l’humanité. C’est seulement en ce sens, et avec cette application toute spéciale, que doivent être admises les réclamations des ouvriers en vue de la diminution des heures de travail.

En effet, depuis plus de cinquante ans, les aspirations et les demandes des classes ouvrières ont pour principal objet de diminuer le nombre des heures données au pain quotidien ; mais la conquête de quelques heures de loisir serait une calamité publique, si elle ne devait profiter qu’à l’ivrognerie et à la débauche. C’est donc un devoir étroit de préparer l’ouvrier à un emploi de son temps qui profite à son progrès moral.

Il n’y a qu’un moyen d’atteindre ce but, c’est de répandre la connaissance et le goût des belles œuvres de l’art. On a dit avec raison : deux mille individus se réunissant pour entendre de belle musique ne seront jamais un danger pour la paix publique ; il suffit de cinq cents individus sortant ivres d’un cabaret pour mettre la France en péril.

Le travail intelligent de l’homme doit se mettre au service de ses besoins naturels, mais non de ses besoins factices. Celle loi s’applique plus rigoureusement peut-être aux beaux-arts qu’à l’industrie. C’est une honte et un sacrilège de faire servir à la dégradation de l’homme les instruments mêmes de son perfectionnement moral. Sans doute, la fantaisie ou le caprice de l’imagination peut avoir son rôle dans les œuvres d’art ; mais c’est à la condition expresse que la fantaisie soit naturelle, spontanée, et n’aille point s’ériger en théorie et en doctrine. D’ailleurs la fantaisie ne peut intervenir que dans des détails secondaires ou dans des ébauches sans prétention.

Aussi l’une des plus importantes applications du goût,