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Page:Pellisson - Chamfort, 1895.djvu/31

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correspondants, se fassent remettre des morceaux destinés à son recueil et qui ne lui parviennent jamais. « C’est, dit-il, pour arrêter le cours de ces interceptions que nous avertissons tous ceux qui veulent bien s’intéresser au succès de cet ouvrage, que nous composons à Bouillon tout ce qui entre dans nos journaux, à l’exception des pièces fugitives ; qu’à Paris surtout personne ne nous aide de ses lumières que M. de C…, notre ami, qui, bien loin de se dire notre collaborateur, ne veut pas même nous permettre de le nommer. » Voilà qui concorde bien avec le témoignage de Sélis nous disant que Chamfort collabora deux ans à peu près[1] à ce recueil, « mais incognito et avec une sorte de honte. Il est impossible, ajoute-t-il, de reconnaître aujourd’hui ses articles ». Et il est vrai qu’en feuilletant cette collection nous n’avons rien trouvé qui ait une marque propre. Cet article sur la Poétique de Marmontel (en trois extraits) est-il de Chamfort ? Il se peut ; et aussi ces comptes rendus des petits actes de Saurin (les Mœurs du temps), de Poinsinet (le Cercle), et encore cette analyse des Lettres de deux amants écrites au pied des Alpes. Mais comment s’en assurer ? Tout cela est clair, correct et sensé. La facture est bonne, mais il n’y a que de la facture. Et voilà justement, je crois, la raison pour laquelle Chamfort, ambitieux comme on l’est à son âge, tenait si fort à ce que ses productions restassent anonymes. Réduit à cette besogne de manouvrier littéraire, il voulait

  1. Il est probable que la collaboration anonyme de Chamfort se prolongea au delà de ce délai de deux ans.