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Page:Pellisson - Chamfort, 1895.djvu/66

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grand comique, en lui pardonnant en faveur du Misanthrope, d’avoir écrit M. de Pourceaugnac. — Après cette étude du talent de Molière, vient celle de son caractère, de son âme, comme dit Chamfort, qui, en quelques pages exactes, pénétrantes et émues, nous montre comment ce poète unique fut aussi un homme supérieur. Enfin le discours s’achève par l’examen des efforts qui ont été tentés par ceux qui ont succédé à Molière. « Tout ce que peut faire l’esprit, venant après le génie, on l’a vu exécuté[1]. » On a même essayé de renouveler la scène en y introduisant la comédie attendrissante et le drame réaliste. Mais, bien que les mœurs offrent une ample matière à la comédie, « rien n’a dédommagé la nation forcée enfin d’apprécier ce grand homme, en voyant sa place vacante pendant un siècle[2]. »

Si brève que soit notre analyse, elle permet pourtant de voir qu’il y a autre chose dans l’Éloge de Molière que ce babil dont parle Grimm. « L’art d’arranger les idées courantes avec un peu d’ordre et une certaine facilité et pureté » ne serait point un mérite à dédaigner ; mais il semble bien, quoi que Grimm puisse en dire, qu’on trouve plus que des idées courantes dans le discours de Chamfort. J’ouvre le cours de littérature de La Harpe ; je lis le chapitre qu’il a consacré à la comédie, au siècle de Louis XIV ; je reconnais sans peine, à certaines formules oratoires, qui paraissent là un peu dépaysées, qu’il y a fondu son Éloge de Molière

  1. Ed. Auguis, I, 26.
  2. Ed. Auguis, I, 27.