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SOUVENIRS SUR JACK LONDON

I


— Damnation ! Je suis un homme blanc avant d’être un socialiste !

Le visage courroucé et frappant de son poing solide la table autour de laquelle nous étions réunis, Jack London semblait avoir ainsi fourni son dernier argument sur la discussion qui nous trouvait tous coalisés contre lui. Cela se passait dans les locaux de la section socialiste de Oakland en Californie, vers l’automne 1904.

Jack London venait de revenir du Japon où il avait été envoyé comme correspondant de guerre sur le front russo-japonais par Hearst. Celui-ci, jeune millionnaire californien, était un des plus puissants propriétaires de journaux aux États-Unis. Il publiait des quotidiens dans toutes les grandes villes et prenait des attitudes « radicales », en prêchant un socialisme châtré à l’usage de la petite bourgeoisie américaine. Son entreprise journalistique avait comme piliers des millions de lecteurs.

Hearst avait choisi London à dessein, car son dernier succès littéraire faisait de lui l’écrivain américain le plus populaire. Il avait été muni des meilleurs lettres de créance, de tout un attirail technique des plus modernes (tente de camp, machine à écrire portative, lit pliant, etc.), et surtout d’un chèque en blanc. Jack London était parti avec l’ardeur